Superposition de site

Le tourisme de l’abandon

Avec  son  ancienne  base  d’espionnage  de  la  NSA,  son sanatorium   lugubre   qui   vit   passer   Hitler,   son  parc d’attractions    soviétique    décrépi    et    autres    lieux abandonnés  de  la  Seconde  Guerre  mondiale  ou  de  la chute du Mur, Berlin s’est imposé comme un temple de l’exploration  urbaine ou  urbex  (urban  exploration). Une  pratique   qui   draine   toujours   plus   de   curieux avides  d’arpenter  les  vestiges  d’un  passé  mouvementé. Au risque de perdre toute sa saveur, de se banaliser et de voir gagner la gentrification de lieux chargés d’histoire. Le dernier en date, l’ancien bâtiment de la Stasi qui a failli héberger un campus Google.
Discipline  qui  se  veut  exclusive  et  secrète,  l’urbex  est devenue  tendance partout  dans le  monde.  Expositions, livres consacrés au sujet, la popularité soudaine de l’urbex a apporté un côté commercial à la discipline. Ce succès a suscité  l’appétit  de  sociétés  privées  qui  proposent,  en accord avec les propriétaires, des droits d’entrée et même des  visites  payantes  de  lieux  abandonnés  et  souvent destinés à le rester, sans véritable projet de réhabilitation. Car  plus  l’endroit  a  été  vide  et  longtemps  abandonné, plus  il  est  difficile  et  cher  à  réaménager.  L’office  de tourisme de Berlin va même jusqu’à dresser une liste non exhaustive des lieux d’urbex, accessibles de manière légale et où se pressent familles et grand public afin de pouvoir ressentir la fascination des lieux en garantissant un accès «  »autorisé et sécurisé » », sans montée d’adrénaline.

Mais  la  perspective  d’un  accès  officiel  et  payant  fait grincer des  dents  les  puristes,  véritables  archéologues dont la seule    motivation    est    de    redécouvrir et documenter un passé parfois proche, et qui hurlent à la marchandisation. D’autres   urbexers,   considérant la discipline  déjà   morte,   s’écartent   de   l’orthodoxie de l’urbex en mettant volontiers sur leur site les coordonnées des friches visitées, souhaitant même les ouvrir à un public plus large, de manière plus officielle, en attirant des touristes dont l’argent pourrait aider à sauver des sites d’importance historique de leur destruction totale.

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